The Bitcoin Society
J'étais présent à la Keynote d’Éric Larchevêque annonçant la création de son nouveau projet entrepreneurial, debrief.
J’étais présent à la Keynote d’Éric Larchevêque annonçant la création de son nouveau projet entrepreneurial, debrief. L’organisation de l’événement en lui-même était assez folle. Il se tenait à l’Espace Clacquesin, à Malakoff, une ancienne distillerie reconvertie en salle d’événements. 500 personnes étaient invitées et il y avait certainement autant de participants sur place (longue liste d’attente). Les profils semblaient relativement variés : entrepreneurs, bitcoiners, influenceurs, etc.
La présentation d’Éric Larchevêque sur la monnaie et le monde fiat
L’annonce et la présentation d’Éric Larchevêque étaient impressionnantes, en tout cas pour les personnes présentes. Visuellement réussie, assez bien rythmée et plaisante à regarder. La première partie, consacrée au chamallow, était certainement celle que j’ai préférée : elle aborde la préférence temporelle, l’économie autrichienne, l’étalon monétaire dur (étalon or classique), la politique monétaire irresponsable des institutions centrales, Friedrich Hayek, la libre concurrence des monnaies...
Ce sont exactement les thématiques qu’on aborde ensemble ici depuis des mois. Cela résonne également profondément avec ce dont parle la communauté des bitcoiners maximalistes et certains libéraux en France depuis des années. Bref, les bitcoiners présents dans la salle étaient assez hype par cette première partie qui annonçait bien la couleur.
La Bitcoin Treasury Company (BTCTC)
“L’objectif de l’activité de Bitcoin Treasury Company est de faire croître le nombre de bitcoins détenus pour augmenter le nombre de bitcoin par action, et donc la valeur pour l’entreprise. Ce capital constitue la base monétaire de notre écosystème, permettant de concevoir des instruments financiers solides et transparents, au service notamment de notre société en réseau et du financement de projets dans l’économie réelle.” - Éric Larchevêque
Le projet d’Éric Larchevêque, « The Bitcoin Society », s’articule autour de trois axes principaux : une Bitcoin Treasury Company, une Network Society et des Clubs Premium.
Le premier volet, la création de la Bitcoin Treasury Company, n’est pas vraiment une surprise : il s’agit de la conversion d’une entreprise déjà cotée à l’Euronext à cette fin. Il s’agit du rachat majoritaire des parts de la société Tayninh (Euronext : TAYN), qui sera transformée en BTCTC. Jusqu’ici, le but d’une telle entreprise et l’objectif de passer sur un étalon Bitcoin sont faciles à comprendre. Il s’agit de choisir la meilleure forme de monnaie disponible, ce qui concorde avec la première partie de la présentation.
L’objectif annoncé est également de faciliter l’accès au bitcoin pour les investisseurs et autres entrepreneurs intéressés par son acquisition, mais qui n’ont ni le temps ni les connaissances nécessaires pour assurer leur propre conservation. C’est le même discours qu’on entend aux États-Unis depuis l’approbation des ETF BTC, la mise en place de la stratégie de Saylor et des autres sociétés de trésorerie Bitcoin : c’est une façon pour l’investisseur classique de s’exposer à Bitcoin, indirectement. Une première étape peut être nécessaire avant d’évoluer vers la détention en propre de ses BTC et vers la souveraineté totale sur sa monnaie, son patrimoine et sa propriété.
Il s’agit de Bitcoin papier, ce qui intéressera davantage les investisseurs traditionnels que les bitcoiners maximalistes, mais c’est peut-être une porte d’entrée nécessaire pour certains qui veulent s’exposer à Bitcoin sans vouloir assumer la responsabilité, donc la liberté, de le posséder en propre. Et ils étaient nombreux à poser des questions sur bitcoin lors du cocktail qui a suivi, la graine est plantée.
La Network Society
“L’objectif de la société en réseau, ouverte à tous, est de proposer une nouvelle voix pour représenter ceux qui partagent les mêmes valeurs de responsabilité individuelle, de travail, d’autonomie financière et de liberté. Elle permettra de mettre en œuvre des actions visant à impacter le débat, éclairer les positions et défendre les intérêts de ses membres. Elle propose aussi un accès large et gratuit à des ressources d’éducation financière.” - Éric Larchevêque
Les bitcoiners connaissent déjà : c’est l’idée des Network States de Balaji et des Free Cities de Titus Gebel. C’est l’idée de monter des groupes d’intérêt, de refonder des communautés rassemblées autour d’un projet, d’un éthos et d’une vision commune : Bitcoin et la vision à long terme qu’il nous offre, une promesse pour refonder nos sociétés en perdition.
Suite aux discussions avec ceux travaillant sur cette partie du projet, les buts sont multiples mais avec un mot d’ordre central : faire de l’éducation autour d’une thématique principale, celle de la Liberté. Il s’agit d’une communauté libre et gratuite qui proposera du contenu gratuit (livres, vidéos, podcasts...). Mais elle fera aussi des actions concrètes (lobbying, communication grand public, sponsoring d’événements libéraux, etc.). Le but est clair : s’engager dans la bataille culturelle et faire avancer les idées de la liberté. La Network Society, c’est prouver que la solution viendra de la mise en relation des individus, pas d’une solution top-down imposée par une organisation centralisée.
Les Clubs Premium
“L’activité de clubs, basée sur un business model d’abonnement annuel, aura pour objectif d’aider les membres freelance, artisans, commerçants, startups, PME, qui veulent débloquer leur croissance à devenir de meilleurs entrepreneurs et les membres souhaitant construire un patrimoine à devenir de meilleurs investisseurs pour un maximum de diversification et de résilience sur les marchés.” - Éric Larchevêque
Le dernier axe, c’est la création de deux clubs privés : un espace réservé aux investisseurs et un autre dédié aux entrepreneurs, le SKL Club. L’objectif est de créer des revenus avec ces initiatives et de fédérer les membres de la Network Society. Ce sont des clubs payants (les modalités seront annoncées plus tard). Ces clubs permettront de faire du réseau professionnel, d’avoir accès à des conseillers, à des gestionnaires de patrimoine, des avocats, des fiscalistes, etc.
Le but est de lier les trois initiatives ensemble pour que les clubs génèrent du cash flow pour la Bitcoin Treasury Company, lui permettant de faire vivre la Network Society... Et vice versa. La question qui demeure est de savoir la capacité qu’auront ces clubs à générer des bénéfices pour alimenter ensuite la BTCTC… Sachant que de telles initiatives peinent souvent à être profitables et à générer des revenus conséquents.
L’après-conférence : entre enthousiasme et interrogations
Pour ceux qui étaient présents, la réaction à l’annonce oscillait entre enthousiasme et questionnements.
L’enthousiasme d’abord, car c’est rafraîchissant d’avoir un tel projet qui aborde clairement les enjeux actuels : la crise de confiance dans la monnaie fiduciaire, l’incompétence des gouvernants et les dangers à long terme de leur politique court-termiste, ainsi que l’aveu que le projet d’avenir qu’on nous vend ne fédère plus. Face à cette crise de confiance et à cette incompétence généralisée, les gens préfèrent s’organiser différemment.
Les questionnements ensuite : sans surprise, beaucoup de personnes se demandaient comment le projet allait concrètement fonctionner. Si l’intérêt d’une Bitcoin Treasury Company est assez facile à saisir, le reste du modèle demeure encore vague pour beaucoup. L’équipe de The Bitcoin Society en est consciente : tout reste à construire, et la proposition de valeur des clubs et du réseau doit être clairement établie.
Par exemple, une des principales questions concerne l’articulation concrète du projet : comment les clubs, la BTCTC et le network vont-ils fonctionner ensemble ? Le modèle envisagé est de constamment convertir les bénéfices des Clubs en BTC.
Cela crée le même engouement que l’entreprise Strategy de Michael Saylor, une boîte dont la valorisation des actions est supérieure à la valeur nette des BTC détenus en sous-jacent, du fait de la promesse future qu’une action représentera “plus de BTC”. Cette approche renforce l’engouement des investisseurs et des actionnaires et conséquemment l’action de la Network Society qui bénéficiera immanquablement d’un tel écosystème.
C’est aussi l’aspect le plus risqué du projet : si l’entreprise décide d’amplifier son exposition à BTC en utilisant du levier, elle risque de subir le même sort que certaines entreprises qui ont adopté la même stratégie et qui sont déjà en difficulté financière. Vigilance donc, ce genre d’approche s’envisage uniquement sur le temps long, jamais sur le temps court où la volatilité de BTC peut faire des ravages. L’actualité américaine sur ces entreprises est assez éloquente à ce sujet.
Conclusion
Le projet de la Bitcoin Treasury Company n’est pas une grande surprise en soi, beaucoup s’y attendaient. Le plus intéressant reste l’ambition de refaire communauté autour de Bitcoin et de la promesse qu’il porte. C’est fédérer les créateurs de richesse afin de peser sur le débat politique et culturel. C’est clairement l’idée de Balaji : créer cette nation numérique, en réseau, solidaire et extrêmement puissante par le capital financier, culturel et humain qu’elle arrive à mobiliser.
Ces initiatives existent déjà sous différentes formes, reste à déterminer quelle proposition de valeur supplémentaire The Bitcoin Society va apporter. Ces réseaux d’entraide et d’influence sont essentiels, c’est ici l’aspect le plus important de ce projet selon moi, bien plus que la BTCTC et les Clubs Premium. D’ailleurs, ces réseaux ne sont pas nouveaux, c’est déjà ce que mettent en place les bitcoiners eux-mêmes de manière souveraine et bottom-up. C’est ce que fait par exemple le Bunker, HTB et c’est également ce que nous faisons d’une autre façon avec le groupe Signal Café Viennois, des initiatives certes plus petites, mais spontanées et donc plus résilientes.
Quoi qu’il en soit, les thématiques BTC, souveraineté et libertés sont à la mode, c’est donc une bonne nouvelle de voir une nouvelle initiative de ce genre émerger et créer une communauté qui se veut stable et prospère dans un monde incertain et qui change très vite. Comme toujours, ce sera au marché de faire le reste, c’est-à-dire de trier les communautés les plus efficaces et de sélectionner les meilleures. Une chose est certaine : The Bitcoin Society et sa Network Society auront une force de frappe considérable, reste à voir leur résilience dans le temps.



